Autrefois la Tranche

Autrefois la Tranche

L'Abbé Le Dolledec

Le Ministère mouvementé de I’ Abbé Le Dolledec Curé de La Tranche-sur-Mer

 

L'Abbé Le Dolledec fut curé de La Tranche pendant 10 ans de 1824 à 1834. Il fut ensuite curé à l'Aiguillon sur mer.

Bien connu comme légitimiste et royaliste, il était souvent en procès avec l'administration publique. 

 

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Lors de sa réunion d'octobre 1825, le Conseil de Fabrique présidé par Dominique François Pierre Le Dolledec (curé de La Tranche depuis le 18 juin 1824) accorde la <<jouissance gratis de la place de banc qui touche les Fonds Baptismaux>> à la femme de chambre <<en considération des travaux de son mari>>.

Ce même jour, les Fabriciens, qui ont constaté le mauvais état de la toiture de l'église construite en I729 (1), signalent <<le besoin urgent de la visite d'un maçon >>.

 

Le 2 avril 1826, ils << dédient pour être occupée gratis par M. Ie Maire de la Commune, une place située dans l'église, entre le banc de la Fabrique et le pilier près le clocher.., >>.

 

A la suite du renouvellement des membres du Conseil, Pierre Guibert-Jouin <<sorti par voix du sort>> est remplacé par Antoine Faure, officier en retraite (Lieutenant des Canonniers Garde-côtes de la Tranche sous I’ Empire),

 

En janvier 1827, I’ abbé Le Dolledec, jugeant ses revenus insuffisants, avertit ses conseillers qu'il ne restera dans la paroisse <<qu'à Ia condition que la commune lui fournisse annuellement le supplément de 500 F qu'on lui offrait au Bernard et à la Jonchère>>.

 

Cette décision ne les surprend pas : <<à longues et diverses vacances (2) I’ absence de cet exercice a déjà fait subir des pertes à I’ église... plusieurs paroissiens ont été déraisonnables et ennemis du bien général... pour refuser de contribuer, selon leur moyen, à former à nos dits pasteurs... un supplément de traitement nécessaire à leur subsistance,.. >>.

 

L'heure n'est pas à Ia mansuétude. Le prix des places de banc qui était de 30 sous est porté à 2 F. Les chefs de famille sont mis en demeure de payer leur quote-part et le Conseil sanctionne Robion, le menuisier, en Ie pri vant du libre usage d'un banc dont il n'a pas payé I' emplacement.

 

Robion proteste en déclarant qu'il a obtenu une concession de trois ans sur I' avis du prédécesseur de I' abbé Le Dolledec et de I' ancien trésorier <<pour I'avoir fait et fourni>>. Son argument étant réfuté, le I6 janvier <<sur les 4 h du soir il pénètre dans l'église avec un maréchal et pose un cadenas à I' entrée du banc. Le lendemain, Le Dolledec,  Denis (maire)(3) et Touveron lui <<ordonnent de lever le cadenas... avant le 20 janvier>> sous peine de faire exécuter ce travail à ses frais,

 

Le dimanche de Quasimodo, le Conseil <<arrête qu'après la mort de chaque locataire de place de banc, Ia dite place sera mise à I' enchère et accordée de préférence, aux héritiers du défunt>> - par une indulgence de I' évêque, Ia  jouissance leur en est laissée <<jusqu'au terme de I' année en cours... à moins que M. le Curé ou le trésorier n'aient des raisons d'agir différemment... >>.

 

L'année 1828 se passe sans incident, mais le 1er Janvier 1829, Goureau, Garde-Dune <<chasse honteusement et publiquement la dame veuve Le Gré de son banc>>. Il récidive les dimanches suivants, L'abbé Le Dolledec et ses Fabriciens - auxquels le Garde-Dune n'a pas payé sa place pour la nouvelle année - défendent au perturbateur <<d'inquiéter la dame Le Gré... sous peine de droit qu'ils arrêtent de réclamer contre lui… >>.

 

Les rapports se dégradent avec la Municipalité. Le Maire ne veut s'occuper depuis deux ans de faire réparer la toiture du presbytère (4) <<nonobstant les justes réclamations... >> de M. le Curé.

Autre grief : des magistrats qui <<preféraient laisser périr I' abbé Le Dolledec sous les ruines de la maison curiale>> ont dénoncé ce <<bon pasteur, chéri de tous les bons habitants>> à l'évêque.

 

En juillet, Nicolas Rabillard, Adjoint, qui s'était retiré du banc de l'oeuvre, tente d'y revenir malgré << la défense faite par le trésorier auquel il a résisté différentes fois... au scandale des fidèles>.

 

L' Adjoint peut s'asseoir sur le banc de la Mairie << où les différents Maires se sont toujours placés.,, ce banc est maintenant occupé tous les dimanches par le colporteur, des enfants ou autres personnes sans qualités >>.

Les Fabriciens informent le Préfet des faits précités.

Le Revillon <<Receveur des Douanes en ce Bourg>> exerce la fonction de secrétaire à partir de janvier 1830.

 

Comme suite à I' affaire Rabillard, le Sous-Préfet répond que le banc de l'oeuvre <<et celui du Maire doivent être en regard I' un de I' autre pour éviter des questions de préséances>> ; mais les Fabriciens refusent cette <<promiscuité>> en raison de <<l'irrégularité que cela causerait à l'église>, <Nos magistrats, écrit Le Revillon, se sont prévalus et vantés qu'ils auraient préséance sur nous; ne connaissant pas la loi qui leur donne cette supériorité dans l'église et ne nous croyant pas obligés de favoriser leur vaine gloire en leur donnant lieu de venir tous les dimanches faire de leur embarras devant nous et causer des distractions à tous les fidèles en troublant particulièrement notre dévotion à nous qui serions derrière eux, nous avons adopté le sentiment de quelques uns de nous qui est d'abandonner notre banc et de nous retirer sur le pavé les jours où nos adversaires viendraient s'installer devant nous avec leur air narguant et opulant,,.>>. Les Fabriciens arrêtent, ce jour-là, de faire couper et mettre en vente le bois de chauffage du cimetière avant le printemps...>>,

 

Le 15 juin 1830, I'abbé Mennuet, Vicaire Général du diocèse et Auvinet Aîné, Sous-Préfet de I'arrondissement viennent à la Tranche et réunissent Conseillers Municipaux et Membres du-Conseil de Fabrique.  L' arrangement suivant met fin à la contestation :

<<Après avoir reconnu qu'il n'y a jamais eu dans notre église d'autre banc de Mairie que celui que nous avions consacré à cet usage par notre arrêté du 2 avril 1826 - banc dont il a plu dernièrement à nos susdits magistrats de se retirer après en avoir joui quatre ans sans s'en plaindre sous aucun prétexte - sur la demande de M. le Maire, présent avec nous et de I' avis et de I' approbation des deux autorités supérieures aussi venues et présentes ad hoc, nous avons unanimement arrêté avec lesdits supérieurs et M. le Maire :

 

-Que M. le Maire de cette commune et son adjoint- auraient seuls une place distinguée ou gratuite dons cette église...-

 

-Que les deux places destinées pour  eux deux et leurs successeurs sont des places neuves faites en même temps, de la même façon, au même alignement et joignant au midi le banc du pupitre ; ce que M. Le Maire a demandé, accepté et agréé en demeure et ce que les supérieurs susdits et nous, lui avons consenti pour lui, son adjoint et leurs successeurs en ces qualités. ., et ainsi toute difficulté présente, future, à cet égard est terminée par cet arrêté.., >>.

 

II est décidé, ce même jour, de faire hausser le presbytère et... l’écurie…

En octobre, Nicolas Martin Père remplace Le Revillon qui a quitté la commune. M. Faure offre à se démettre de la trésorerie en raison de son âge, <<de ses infirmités et de sa main tremblante>>.

 

L'argent provenant de la location des places de banc, des droits de sépulture et de mariage rentre difficilement. Nicolas Martin Fils, les héritiers de Louis Levereau et Bienvenu Gauvreau, cabaretier, sont menacés de poursuite - Gauvreau doit  96F 64c à la Fabrique depuis trois ans.

 

En janvier 1831, les Fabriciens décident d'agrandir le cimetière (5) <<dans le midi>> où se trouve une luzernière qui permet au curé de nourrir <<une monture et une vache>> - le complément de fourrage est récolté dans le <<Tronçon de la Corba depuis un temps immémorial>> et dans le <<Recoin depuis qu'il a été adjugé au presbytère par le Conseil Municipal dans sa session du mois de mai  1828...>>; mais des <<bruits de contestation... sur ces deux propriétés>> se répandent dans la paroisse.

 

Le feu couve pendant deux ans, puis en 1833, le curé apprend que le Conseil Municipal a I' intention de se débarrasser de lui en logeant << un régent qui vit publiquement avec une autre femme que la sienne dans le presbytère>>. Autre menace: le démembrement de la Cure  dont on veut détacher les deux petits prés. Les Fabriciens réagissent aussitôt : <<,,. Nous arrêtons.. de soutenir nos droits sur ces prés par tous les moyens légaux et de nous opposer par voie de justice à ce que personne en dispose que nous et nos pasteurs...>>.

 

Le 16 juin, ils protestent <<contre I' adjudication que M. le Maire s'est permis de faire... à son cousin et compère Jean Rabillard, Garde-champêtre, qui en était le crieur, de I' herbe du cimetière et des deux tronçons de la Cure>> ; ils prient conséquemment M. le Préfet de vouloir bien... rendre justice en annulant ladite adjudication>> ou de les autoriser à poursuivre judiciairement>> M. le Maire.

 

En juillet, ils affirment que plus de cent habitants <<auraient eu besoin de ces fourrages et les eussent fait doubler de prix>> mais I' adjudication leur a paru <<illégale; arbitraire, injuste, vexatoire, criante et déshonorante>>, pour la paroisse. Personne n'avait, jusqu'à présent, enlevé au curé la jouissance de ces trois herbages. <<tous les moyens légaux et judiciaires seront immédiatement employés contre ladite adjudication...>>, et si cela ne suffit pas, ils recoureront au… Ministre.

 

Autre sujet de mécontentement : le Maire (7) a refusé de rendre 143F 5c provenant d'un mobilier qu'il a vendu pour le compte de la Fabrique. <<Cette somme, dit-il, a été employée à payer des fêtes qu'il donnait, dans son auberge, en I' honneur de Charles X>>.

 

Pierre Goulipeau démissionne le premier dimanche d'octobre : <<Cela déplaisait à ses enfants qu'il fût dans le Conseil ne sachant point écrire>>. René Frémit, venu Ie chercher après Vèpres, le trouve <à  liasser des oignons>>. Louis Carré-Roi <<l'un des notables de notre commune>> le remplace. Ce dimanche-là, <<à I' issue de la messe paroissiale, le Maire… agissant en cette qualité, s'est encore permis de crier luï même et d'adjuger les deux tronçons de la Cure,,. à son cousin>>, Les Fabriciens arrêtent de <<recourir à M. le Ministre de I 'Intérieur et les Cures contre cette adjudication à moins que M. le Préfet ne réponde favorablement à Ia juste réclamation... tendant à obtenir du Conseil de Préfecture, I' autorisation de Ie poursuivre. .. >>.

 

L'abbé Le Dolledec  signe le registre des délibérations pour la dernière fois, le dimanche de Quasimodo  1834. Une réunion extraordinaire a lieu ce jour-là <<par ordre de Monseigneur l'Évêque de Luçon> pour recevoir ses comptes. <<il était redevable à notre Fabrique de 44 F... somme déposée entre les mains de M. Besson, Curé actuel>>.

 

Un autre incident  avait opposé le Maire à l'abbé Le Dolledec en 1830. Ce dernier avait été condamné à trois mois de prison <pour avoir protesté trop vivement contre les impôts dont étaient surchargés ses paroissiens>> (8)

 

(1) A l’emplacement de l’église actuelle

(2) La paroisse a manqué de prêtres trois fois depuis trente ans qui font au total six à sept ans de vacance.

(3) Denis Maire de la Tranche

(4) Le presbytère était avenue Victor-Hugo, n. 31. Cadastre de 1811.

(5) Actuellement Place de la Liberté.

(6) La commune avait été érigée en cure en 1615 - note de I' abbé Belloteau ( Curé depuis 1779 et succursaliste depuis le 17 avril 1803 (Archives Municipales).

(7) Bienvenu Gauvreau.

(8) E. Gabory, Les Bourbons et la Vendée, Paris, Perrin et Cie, 1923, p. 315.

(9) Dimanche de Quasimodo : 2ème dimanche après Pâques

 

Conseil de fabrique : 

Au sein d'une paroisse catholique, le conseil de fabrique est, jusqu'en 1905 en France, un ensemble de personnes (clercs et laïcs dits fabriciens) ayant la responsabilité de la collecte et de l'administration des fonds et revenus nécessaires à la construction et entretien des édifices religieux et du mobilier de la paroisse : église(s), chapelle(s), calvaire(s), argenterie, luminaire(s), ornement(s), etc.

 

Les revenus de la fabrique provenaient des quêtes, offrandes, dons en nature, loyers et fermages, legs mais aussi de la location des places de bancs dans l'église.

 

 

Publié par Michel BOIRAL dans le bulletin municipal N° 7 de décembre 1986 et tiré d'une de ses publications en 1975

ALT - JPB -3 -2025

 

 



28/03/2025
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