ÇHAU SAPRAI TIRÉSIAS
Tirésias, ol ét pa n'inporte qui,
l'ét le ga a Évérés, in oume mortàu, pi a la nénfe Chariclo qui fét partie de la tirolàie d'Aténa,
queme qui dirét Minérve ché lés Rouméns. O fét que l'ét in poe cousin avéc lés dieùs.
Tirésias se prmene den la fouràet entour de Tébe, quant le voet deùs sérpents qui velant
s'acoubllàe. Ol li vaet l'idàie tot
d'in coup de lés devisàe : en vrae, le lés garoche avéc sun batun, chaquin d'in coutai. Le
savét pa qu'ol étét daus bàetes sacràies, l'o z-at vite cunpris : l'ét chanjhai en fame, to-cort su pllace.
Le finit pr s'aroutinàe de sun novea charcoe.
O fét sét annàies asteùre que l'at devénghu ine
fame.
Le se prmene den la maeme fouràet, quand le tunbe encore su deùs sérpents qui velant s'acoubllàe. Le sunjhe d'in coup, que si en lés devisant, ol l'at chanjhai en fame la prmére
foes, o devret le chanjhàe en oume la deùsiaeme foes.
O fét que le devise lés deus bàetes, pi
pa mancai, le revaet en oume acuntinent.
Le reprent sés afaeres d'oume en se disant qu'o fàut pu enniàe lés sérpents qui s'acoubllant.
Le veùt rechtàe trançhile asteùre, pasqu'ol ét nijhant de chanjhàe de séxe queme l'at fét.
La coetance dure pa luntenp :
den l'Olénpe, o vaet in grous jhaspinajhe entr Zeùs pi sa fame Éra su le pllési de chaquin pen
dant l'amour. Zeùs dit que la fame en at bérède meù que l'oume. Éra, lai, a dit la cuntraere, pi pa yin veùt çhulàe su l'outre.
L'arivant a s'arimàe quant maeme pr demandàe sen évis a Tirésias, li qu'at étai lés deùs, oume pi fame.
Tirésias ét méfious, pasque l'at afaere diréct aus dieùs de l'Olénpe, pi su çhau sujhét l'at déjha dounai béréde. Le se renjhe a l'évis de Zeùs, qu'ét le patrun, o li parét moén riscous.
Le dit de maeme : si le pllési entér daus deùs prsounes ét départi en dis, la fame en prent neùv, pi l'oume yin.
L'arét du se doutàe qu'Éra étét fortative, al endure pa çhau jujhement a cuntre le sun : a rend Tirésias avéglle pr le rechtant de sés jhours.
Zeùs, qui pét rén dire su çhél avisement de sa fame, asséye d'amoduràe la paene de Tirésias : le li doune le dun de devine, pi le le fét vivàe béréde pu vieùs que le munde normàu pasqu'o vat duràe pendant sét jhenéraciuns.
Çhau saprai Tirésias devaet le devinour oficiàu de la vile de Tébe, pi le mourt vrae vieùs. O se dit qu'ol ét enpràe avoer bu de l'aeve trop fréde, qui li arét callai su le jhabot.
Queme quoe, ol ét trjhou riscous de dounàe sen évis aus pissents, si ol ét pa queme le velant : le te baesant d'ine façun ou bae d'ine outre.
Didier Martineau
Çhél écrivajhe ét sorti de sun livre
biléngue, Zeus et les siens
paru dans Bernancio n° 143
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Ce sacré Tirésias
Tirésias, ce n’est pas n’importe qui,
C’est le fils de Évérés, un homme mortel, et de la nymphe Chariclo qui fait partie de la suite nombreuse d’Athéna, comme qui dirait Minerve chez les Romains. Cela fait qu’il est un peu cousin avec les dieux.
Tirésias se promène dans la forêt autour de Thèbes quand il voit deux serpents qui voulaient s’accoupler. Il lui vient l’idée tout d’un coup de les séparer : en vrai, il les jette avec son bâton, chacun de leur côté. Il ne savait pas que c’étaient des bêtes sacrées, il l’a vite compris : il est changé en femme instantanément sur place.
Il finit par s’habituer de son nouveau corps.
Ça fait sept ans aujourd’hui qu’il est devenu une femme.
Il se promène dans la même forêt, quand il tombe encore sur deux serpents qui voulaient s’accoupler. Il pense d’un coup, que si en les séparant ça l’a changé en femme la première fois, ça devrait le changer en homme la deuxième fois. Il divise les deux bêtes et ça n’a pas manqué, il redevient en homme en un instant.
Il reprend ses habits d’homme en se disant qu’il ne faut plus ennuyer les serpents qui s’accouplent. Il veut rester tranquille maintenant, parce que qu’il est fastidieux de changer de sexe comme il l’a fait.
La tranquillité ne dure pas longtemps : dans l’Olympe, il arrive une grosse discussion entre Zeus et sa femme Éra sur le plaisir de chacun pendant l’amour. Zeus dit que la femme en a beaucoup plus que l’homme. Éra, elle, dit le contraire et aucun ne veut reculer sur l’autre.
Ils arrivent à s’entendre quand même pour demander son avis à Tirésias, lui qui avait connu les deux homme puis femme.
Tirésias est méfiant parce qu’il a affaire directement aux dieux de l’Olympe, et puis sur ce sujet il a déjà donné beaucoup.
Il se range à l’avis de Zeus qui est le patron, ça lui parait moins risqué.
Il dit comme ça : si le plaisir entre les deux personnes est partagé en dix, la femme en prend
neuf et l’homme un.
Il aurait dû se douter qu’Éra était d’un tempérament fort, elle n’accepte pas ce jugement contraire au sien : elle rend Tirésias aveugle pour le restant de ses jours.
Zeus qui peut rien dire sur cette décision de sa femme essaie d’amoindrir la peine de Tirésias : il lui donne le don de devin, puis il le fait vivre beaucoup plus vieux que le monde normal puisque ça va durer pendant sept générations.
Ce sacré Tirésias devint le devin officiel de Thèbes, puis il mourut très vieux. Il se dit que c’est après avoir bu de l’eau trop froide qui lui serait restée sur l’estomac.
Comme quoi, c’est toujours risqué de donner son avis aux puissants, si ce n’est pas ce qu’ils veulent : ils te baisent d’une façon ou bien d’une autre.
Didier Martineau
Tiré de son livre bilingue, Zeus et les siens
Traduction Jean-Pierre Bouchet – ALT – 6-2025
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