Autrefois la Tranche

Autrefois la Tranche

Le loup et l'agneau

LE LOUC ET L’GNA

LE LOUP ET L’AGNEAU

 

In tout p’tchit gna, in gna d’l’an-naïe

Qui v’net à pein-n’ d’étr’ détrié

Buvet à la rouère in’ réciaïe,

A l’imbre d’in grand puplier.

Quand (i) a-t-adju bu d’iau courante,

En tornant la taït’, peur hasard,

L’vit in’ baït’ qu’avet l’ér méchante,

Qui s’ deurset d’’sso in châgn’ tétard.

All’ le regardet avec envie ;

On aret dit qu’étet in chin,

Mé pas keum lés chins d’mouétairie,

(I)Avet lés poels béred’ moins lings.

Etet l’louc. Le v’la qui s’approche.

« C’ment s’fait o, djissit euil au gna,

Qu’tu vins bouèr meun iau so tchett’ roche ?

Savas-tu pas qu’étet à ma ? »

Le p’tchit gna trembiet keum la feille.

« Si (i) ava su qu’o v’ déranget,

Fit euil, (i) ara bu dans la seille ;

Ine autr’ foués i v’ dérang’rai pouet.

-Assez, i vu pas qu’tu m’répindes,

L’an-naïe dérgnér, tu m’as peurtout

Fait passer peur la goule’ dau minde,

Espèc’ de sal’ moutin crottoux !

- I viva pas l’an-naïe dergnère,

 (I) pas pu d’jir dau mal de vous.

-Si èst pas ta ol ést tin frère,

(I) o said bé qu’ve m’en v’lez teurtous.

-I sé tout sul, c’m in’ pauvr’ p’tchit baïte,

(I) ai jamais c’nu gni frèr’ gni sœur.

-Assez ést grand temps qu’ol arraïte.

Est o possib(i)’ d’etr’ si menteur !

Pis, après tout, pas tant d’magnière,

(I)En ai assez d’tés kimpiiments »

Le louc le prend dans sa machouère,

L’l’écrapoutchit entre sés dents.

 

Un tout petit agneau, un agneau de l’année

Qui venait à peine d’être sevré

Buvait à la rivière une fin d’après-midi,

A l’ombre d’un grand peuplier.

Quand il a bu l’eau courante,

En tournant la tête par hasard,

Il vit une bête qui avait l’air méchant,

Qui somnolait sous un chêne têtard

Et le regardait avec envie ;

On aurait dit que c’était un chien,

Mais pas comme un chien de métairie,

Il avait les poils beaucoup moins longs.

C’était le loup. Le voilà qui s’approche.

« Comment que se fait-il, dit-il à l’agneau,

Que tu viens boire mon eau sur ce rocher ?

Ne savais-tu pas qu’elle est à moi ? »

Le petit agneau tremblait comme une feuille.

« Si j’avais su que ça vous dérangeait,

Fit-il, j’aurais bu dans le seau ;

Une autre fois je ne vous dérangerais pas.

-Assez, je ne veux pas que tu me répondes,

L’année dernière, tu as partout

Fais  parler de moi à tout le monde,

Espèce de sale mouton crotteux !

-Je ne vivais pas l’année dernière,

Je n’ai pas pu dire du mal de vous.

-Si c’est pas toi c’est donc ton frère,

Je sais bien que vous m’en voulez tous.

-Je suis tout seul comme une pauvre petite bête,

Je n’ai jamais connu ni frère ni sœur.

-Assez, il est grand temps que ça s’arrête.

Est-il possible d’être si menteur !

Et puis, après tout, pas tant de manières.

J’en ai assez de tes compliments. »

Le loup le prend dans sa mâchoire

Et l’écrase entre ses dents.

 

 

Rédaction et traduction Jean Pierre Bouchet 11-2017

 



04/11/2017
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