Autrefois la Tranche

Autrefois la Tranche

La légende de Bélesbat

La légende ou la punition de Bélesbat

 

 

Longtemps dénudées et arides les dunes qui bordent la côte entre Jard et La Tranche, sont aujourd’hui plantées de magnifiques pins maritimes. La vigne elle-même  y prospère, toujours vivace sous l’influence du bon air salin grâce auquel elle se rit de ce maudit phylloxéra qui, dans l’intérieur des terres a successivement dévasté les meilleurs fiefs du Bas-Poitou, notre actuelle Vendée.

 

Le petit vin issu de cette vigne est appelé bidrouillet  sur la côte de Jard.

 

On a trouvé jadis dans le sable, paraissant enfouis depuis des siècles, des tas de débris de toute sorte en morceaux : flèches, tuiles, ferraille, vases  et pots de toutes les formes et de toutes les grandeurs et de couleurs.

 

Une vieille tradition locale en dehors de toute recherche historique dit ceci :

 

Autrefois il y avait une ville et même une grande ville. Comme un peu toutes les grandes villes, celle-ci était un lieu de plaisir, et c’est pourquoi on l’appelait Bélesbat, nom que porte aujourd’hui l’emplacement où on a trouvé tous les débris.

 

Lieu de plaisir est impropre ; lieu de débauches serait plus exact.

 

Jour et nuit, d’un bout à l’autre de l’année, ce n’était dans cette ville qu’une suite d’orgies ininterrompues, où les participants se livraient à des crimes contre nature dont l’idée seule ferait frémir.

On s’en doutait bien un peu dans le pays mais on ne pouvait rien affirmer de précis.

 

Cette ville était habitée par des étrangers venus un beau matin on ne savait d’où et qui, une fois installés, s’étaient entourés de murs énormes, percés d’une seule porte donnant sur la mer et toujours fermée.

 

Un seul habitant du pays avait la faveur de pénétrer dans cette ville mystérieuse. C’était  un brave menuisier. Il était si compétent que les habitants de la ville lui confiaient leurs réparations un peu compliquées.

Deux hommes masqués sortaient alors des remparts et allaient droit à la cabane du menuisier, lui bandaient les yeux et le conduisaient par la main jusqu’au logement dans lequel il devait travailler. Là, on lui enlevait son bandeau et il se mettait à l’ouvrage sous la surveillance d’un gardien masqué, comme les autres qui l’ont conduit.

Le travail fini, l’ouvrier recevait une pièce d’or pour salaire, puis on lui bandait de nouveau les yeux et on le conduisait jusqu’à la porte de la ville qui s’ouvrait pour lui laisser passage et se refermait aussitôt derrière lui.

 

Un jour que notre homme ait été réquisitionné pour une réparation dans une maison de la ville, son gardien le voyant tout entier au travail, crut pouvoir sortir quelques instants.

Entraîné par la curiosité,  le menuisier, intrigué par une énorme porte entrebâillée par hasard, la poussa d’une main. Aussitôt il recula d’horreur tellement le spectacle était épouvantable ...

La porte qu’il venait de pousser donnait dans une immense salle où se trouvaient entassés en ignobles pyramides des cadavres encore tout sanglants !  Puis sur les dalles, au plafond, sur les murs étaient fixés des bras, des jambes, des têtes, des pieds et des mains, des langues, des troncs...

Ils étaient disposés en forme de guirlandes, de couronnes, de fleurs et de caricatures toute plus monstrueuses les unes que les autres !

Le menuisier, honnête homme et débrouillard, sut tout de suite ce qu’il devait faire.

Il repoussa la porte et, s’adressant au gardien qui venait de rentrer :

-Je ne peux continuer mon travail car il me faudrait un outil que je n’ai pas apporté. Mais je reviendrai demain.

Sans défiance aucune,  le gardien lui banda les yeux et le conduisit comme à l’ordinaire jusqu’à la porte de la ville.

 

 

Dès qu’il fut dehors, le menuisier se mit à courir à perdre haleine jusqu’à la demeure du chef druide de la tribu (il appartenait à une des nombreuses peuplades gauloises de la contrée)

A peine notre homme eut-il décrit à son chef l’affreux spectacle qu’il avait vu, que le prêtre gaulois, rempli d’horreur et d’indignation, saisit la corne qui lui servait à appeler ses fidèles, s’en alla le long de la côte en soufflant  à pleins poumons.

A ce signal bien connu, toute la peuplade s’empressa d’accourir et se rassembla autour de lui.

Devant tout le monde et sur l’ordre du prêtre, le menuisier fit alors le récit de ce qu’il avait vu. Un long cri d’indignation s’éleva aussitôt du sein de l’assemblée et, séance tenante, il fut décidé qu’on profiterait de la nuit prochaine justement sans lune, pour surprendre la ville, à la faveur de l’obscurité et punir les monstres  qui l’habitaient.

Ainsi fut fait. A l’heure de minuit, les murs de la ville furent escaladés sans bruit à l’aide de longues échelles. La peuplade envahit la ville et surprit les habitants au milieu de leurs orgies et les massacra tous jusqu’au dernier.

Mais ce n’est pas tout, il était dit que la ville devait disparaître comme ses infâmes habitants...

 

Le druide se retira alors un peu à l’intérieur des terres suivi de toute la peuplade, puis il se mit en prière en s’adressant aux dieux vengeurs.

L’invocation à peine terminée, on entendit tout à coup un bruit épouvantable : c’était la mer qui envahissait la ville de corruption.

Le lendemain, au lever de l’aurore, l’océan s’était retiré, mais à la place de la cité, il n’y avait qu’une énorme dune de sable.

Voilà sans doute pourquoi on retrouve tant de débris aux formes bizarres en fouillant à l’emplacement de ce qui porte aujourd’hui le nom de la plage de Belesbat à Saint Vincent sur Jard.

 

Clemenceau a donné le nom de Bélébat ou Bélesbat à sa « bicoque » de Saint Vincent devenue aujourd’hui musée Clémenceau.

 

 

 

 

 

 

Il existe de nombreuses variantes de cette légende avec d’autres personnages ou en d’autres temps.

 

Cette légende fait partie des villes englouties comme Ys près de la pointe du raz qui a donné le nom à la baie des trépassés ou la ville d'Herbauge au fond du lac de Grand Lieu.

 

 

Merci à Chouchou pour m’avoir inspiré pour redécouvrir cette légende. JPB

 



06/09/2019
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