Autrefois la Tranche

Autrefois la Tranche

La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf

 

 

La gueurnoille et l’boeu

 

In’malheureus’ gueurnoille d’égaille,

Qu’étet grousse à pein-n’ c’m un luma

Argardet passer in boeu gras

Qui ii paraisset d’in bell’ taille

A djissit : « Q’est o tchett baït’ là?

Mon Djeu ! c’m a det être affligaïe ! »

A-t’ell’ mangé d’la treuf(i)’ mouillaïe ?

Est teurjous bé d’ l’enfiess’ qu’alle a ! »

Ine aotr’ gueurnoille qu’étet pus veille,

Répougnit : « Daux boeus d’ tchette’ bête,

Ol en a bé d’aotr’s dans lés téts ! »

I cré bé qu’ést pouet in’ merveille. »

« Si (i) essaya d’ dev’gnir c’m entre eux,

Fis la pus jenne, i s’ra p’t-êtr’ meux. »

Pis la v’la qui c’mence à s’étendre,

A s’mettr’ de l’ér tout sin piein ventre,

Si bé, si bé qu’ sa pauvre pê

C’mencet à s’ guinfier c’m in botrè.

L’aotr’ djissit : « T’és teurjous bé gueude !

Ta pè tchir’ tant qu’alle en ést reude. »

-S’ret o qu(i) ara bérèd groussi ?

-Nin poet, mé i cré bé qu’ t’és folle.

-Sé-z-i grousse bétout c’m in’ citrôle ?

-T’és s’ment pas grousse c’m la souris

Qu’(i) avins vue hiér dans l’fié d’la R’maîe.

-Sé-z-i pas bétout arrivaïe ?

-Est encor pas peur tchett an-naïe. »

A v’lit s’guinfier encor,

Mé la pé ii tchira si fort

Qu’alle en a keurvé d’affilaïe.

 

 

La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf

 

Une malheureuse  grenouille de rosée,

Qui était grosse à peine comme un escargot,

Regardait passer un bœuf gras

Qui lui paraissait de belle taille

Elle se dit : « Qu’est ce que c’est cette bête là ?

Mon Dieu ! comme elle doit être handicapée ! »

A-t-elle mangé du trèfle mouillé ?

C’est toujours bien de l’enflure qu’elle a ! »

Une autre grenouille qui était plus vieille,

Répondit :  « des bœufs comme cette bête,

Il y en a bien d’autres dans les étables ! »

Je crois bien que ce n’est pas une merveille. »

« Si j’essayai de devenir comme eux,

Fis la plus jeune, je serai peut-être mieux. »

Puis la voilà qui commence à s’étendre,

A se mettre de l’air plein son ventre.

Si bien, si bien que sa pauvre peau

Commençait à se gonfler comme une baudruche.

L’autre lui dit : « t’est toujours bien repu !

Ta peau s’étire tant qu’elle en devient raide. »

-Serait-il que j’ai beaucoup grossi ?

-Non point, mais je crois bien que tu es folle.

-Suis-je grosse bientôt comme une citrouille ?

- T’est seulement pas grosse comme la souris

Que nous avons vue hier dans la propriété de la Remaîlle

-Suis-je pas bientôt arrivée ?

-C’est encore pas pour cette année. »

Elle voulut se gonfler encore,

Mais la peau se déchira si fort

Qu’elle en a creva aussitôt

 

 

ALT JPB-2018

Rédaction et Traduction JP Bouchet

Tirée du livre de Eugène Charier :  Fables en patois vendéen



02/02/2018
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